Sardarabad : saison 2
Varoujan Sirapian
directeur de la revue « Europe&Orient »
Erevan, 1er mai 2018
A la veille de mon retour en France, j’ai laissé tout de côté pour sortir dans la rue ce 1er mai, pour être parmi les manifestants, très nombreux autour de la place de la République d’Erevan, dans
les rues adjacentes, réunis dans l’attente de l’élection du candidat du peuple, Nikol Pachinian, au poste du Premier ministre.
les rues adjacentes, réunis dans l’attente de l’élection du candidat du peuple, Nikol Pachinian, au poste du Premier ministre.
La foule a commencé à se réunir autour de Laplace de la République à partir de 9h. A la fin de la journée il y avait plus de 150000 personnes. |
Plus de 100000 personnes, d’Erevan mais aussi venues des régions, unies, plein d’espoir, fiers de leur lutte qui dure depuis deux semaines, dont la première victoire s’est concrétisée avec la démission de l’éphémère Premier ministre et ex-président Serge Sargsyan.
Alors que le parti Républicain avait annoncé de ne pas présenter un candidat à l’élection du nouveau premier ministre, alors que les deux partis de la coalition Arménie Prospère et la FRA avaient annoncé qu’ils allaient voter pour Nikol Pachinian, ce dernier n’était pas du tout convaincu que la partie était gagnée d’avance.
Résistance du parti républicain
Il avait raison. Les débats qui ont commencé dans l’enceinte du parlement à 12h avec le discours de l’unique candidat se sont éternisés avec 26 députés inscrits pour poser des questions, dont la majorité appartenait au Parti Républicain. Il était évident que le parti au pouvoir avait décidé de jouer la montre et user aussi bien le candidat que les manifestants.
Nikol Pachinian, « le candidat du peuple » lors de son discours d’ouverture au Parlement |
A 20h45, après le discours de clôture de Nikol Pachinian on a procédé au vote sans possibilité d’abstention. En 30 secondes le verdict est tombé : 45 pour, 56 contre. Les députés des partis Yelk, Arménie Prospère
et la FRA ont voté pour. La totalité des députés de la PRA contre. Le candidat n’est pas élu. RDV dans 7 jours. Si encore une fois il n’y a pas d’élu le parlement s’autodissoudra pour aller à de nouvelles élections. Ce que ne veut pas Nikol Pachinian, puisque aucune élection n’aura de légitimité selon lui si elle est organisée par l’actuel régime.
Arménie rentre dans une zone de turbulence.
Il y a cent ans en mai 1918 Arménie a failli disparaître à Sardarabad. L’armée turque était décidée d’éradiquer ce qui restait de l’Arménie historique (suite au génocide de 1915-1917). Dans un dernier sursaut les Arméniens, le couteau sous la gorge, mal équipés et en sous nombre, ont battu l’armée turque contre toute attente.
Aujourd’hui, l’Arménie est en danger de disparition à cause d’une gouvernance oligarchique depuis une vingtaine d’année, qui pousse la population à émigrer en masse.
Nous sommes peut-être à la veille d’un autre Sardarabad, cette fois contre des ennemis intérieurs.