Netanyahou porte la responsabilité de cette guerre entre Israël et Gaza

par | 9 Oct 2023 | Éditorial

Éditorial de Haaretz

 

Le désastre qui s’est abattu sur Israël lors de la fête de Simchat Torah est clairement imputable à une seule personne : Benjamin Netanyahu. Le Premier ministre, qui s’enorgueillit de sa vaste expérience politique et de sa sagesse irremplaçable en matière de sécurité, n’a absolument pas identifié les dangers dans lesquels il menait consciemment Israël en établissant un gouvernement d’annexion et de dépossession, en nommant Bezalel Smotrich et Itamar Ben-Gvir à des postes clés, en adoptant une politique étrangère qui ignorait ouvertement l’existence et les droits des Palestiniens.

M. Netanyahou tentera certainement de se soustraire à ses responsabilités et de rejeter la faute sur les chefs de l’armée, du renseignement militaire et du service de sécurité Shin Bet qui, comme leurs prédécesseurs à la veille de la guerre du Kippour, ont estimé que la probabilité d’une guerre était faible et que leurs préparatifs en vue d’une attaque du Hamas s’étaient avérés défectueux.

Ils méprisaient l’ennemi et ses capacités militaires offensives. Au cours des prochains jours et des prochaines semaines, lorsque l’ampleur des échecs des forces de défense israéliennes et des services de renseignement sera révélée, une demande justifiée de remplacement et d’inventaire ne manquera pas de se faire jour.

Toutefois, l’échec de l’armée et des services de renseignement n’exonère pas M. Netanyahou de sa responsabilité globale dans la crise, puisqu’il est l’arbitre ultime des affaires étrangères et de la sécurité d’Israël. M. Netanyahou n’est pas un novice dans ce rôle, comme l’était Ehud Olmert lors de la deuxième guerre du Liban. Il n’est pas non plus ignorant en matière militaire, comme l’ont prétendu Golda Meir en 1973 et Menachem Begin en 1982.

M. Netanyahou a également façonné la politique adoptée par l’éphémère « gouvernement du changement » dirigé par Naftali Bennett et Yair Lapid : un effort multidimensionnel visant à écraser le mouvement national palestinien dans ses deux ailes, à Gaza et en Cisjordanie, à un prix qui semblerait acceptable pour l’opinion publique israélienne.

Dans le passé, M. Netanyahou s’est présenté comme un dirigeant prudent qui évitait les guerres et les pertes multiples du côté d’Israël. Après sa victoire aux dernières élections, il a remplacé cette prudence par la politique d’un « gouvernement de droite », avec des mesures manifestes prises pour annexer la Cisjordanie et procéder à un nettoyage ethnique dans certaines parties de la zone C définie par Oslo, y compris les collines d’Hébron et la vallée du Jourdain.

Il s’agissait également d’une expansion massive des colonies et d’un renforcement de la présence juive sur le Mont du Temple, près de la mosquée Al-Aqsa, ainsi que de vanter un accord de paix imminent avec les Saoudiens dans lequel les Palestiniens n’obtiendraient rien, et de parler ouvertement d’une « seconde Nakba » au sein de sa coalition gouvernementale. Comme prévu, les signes d’une reprise des hostilités ont commencé en Cisjordanie, où les Palestiniens ont commencé à sentir la main plus lourde de l’occupant israélien. Le Hamas a profité de l’occasion pour lancer son attaque surprise samedi.

Surtout, le danger qui guette Israël depuis quelques années s’est pleinement concrétisé. Un premier ministre inculpé dans trois affaires de corruption ne peut pas s’occuper des affaires de l’État, car les intérêts nationaux seront nécessairement subordonnés à la nécessité de l’extraire d’une éventuelle condamnation et d’une peine de prison.

C’est ce qui a motivé la mise en place de cette horrible coalition et le coup d’État judiciaire proposé par Netanyahou, ainsi que l’affaiblissement des hauts gradés de l’armée et des services de renseignement, qui étaient perçus comme des opposants politiques. Le prix a été payé par les victimes de l’invasion dans le Néguev occidental.

Source : https://www.haaretz.com/opinion/editorial/2023-10-08/ty-article-opinion/netanyahu-bears-responsibility/0000018b-0b9d-d8fc-adff-6bfd1c880000
Traduit de l’anglais par Jean Dorian.