Lettre des alumni de l’UFAR au président E. Macron
Association
UFAR Alumni
10 rue David Anhaght
0037 Erevan – Arménie
Erevan,
le 4 novembre 2020
Monsieur
le Président,
Nous,
les alumni de l’Université française en Arménie (UFAR), avons été formés par la
France, qui, par le biais de l’UFAR, investit dans la jeunesse arménienne. Cette
même jeunesse qui, aujourd’hui, se fait tuer par l’Azerbaïdjan.
Depuis
le 27 septembre 2020, les Arméniens font face à une agression sans précédent, lancée
par les dirigeants politico-militaires de l’Azerbaïdjan avec le soutien direct
de la Turquie. Cette agression a lieu en pleine pandémie de Covid-19, alors que
l’Organisation des Nations Unies avait appelé à un cessez-le-feu mondial. Cette
guerre s’accompagne de violations flagrantes du droit international : les
forces azerbaïdjanaises prennent délibérément pour cible des établissements
civils, notamment des écoles et des hôpitaux, tout en utilisant des armes proscrites
par le droit international, à savoir des armes à sous munition et des munitions
au phosphore. Cette guerre porte les germes d’une crise démographique,
économique, sanitaire, ainsi que d’une émigration massive.
A
ce jour, mille cent soixante-dix-sept de nos compatriotes dont quatre jeunes représentants
de la communauté ufarienne sont tombés héroïquement au combat. Parmi les
populations civiles, cette guerre a déjà fait quarante-six victimes et cent
quarante et un blessés. A ce décompte funeste s’ajoute celui des vingt-quatre
mille enfants actuellement privés de leur droit à l’éducation suite aux
bombardements de plus de soixante-dix établissements scolaires au Karabakh.
Monsieur
le Président, vous avez été le premier dirigeant étranger à dénoncer
l’implication de combattants terroristes étrangers dans ce conflit et à pointer
l’absence de justification aux premières frappes parties d’Azerbaïdjan le 27
septembre. Nous saisissons cette occasion pour vous remercier d’avoir fait
entendre ces vérités basées sur les faits. De fait, la population pacifique de
l’Arménie et du Karabakh n’avait aucune intention de faire la guerre et ne
souhaite aucunement la poursuivre. Nous ne souhaitons qu’une chose : vivre
et créer pacifiquement sur nos terres ancestrales. Malheureusement l’agresseur,
qui a rompu à trois reprises le cessez-le-feu conclu grâce aux efforts des
coprésidents du groupe de Minsk, rejette tout règlement pacifique et conjugue
ses attaques avec un discours de haine envers les Arméniens.
En
1915 quand un crime terrible fut commis contre notre peuple, la France a accueilli
les rescapés du génocide. Nous n’oublions pas le sauvetage par la Marine française
de quatre mille quatre-vingts douze Arméniens retranchés depuis cinquante-trois
jours sur le Musa Dagh. Nous
n’oublions pas non plus qu’en 1988, suite au tremblement de terre dévastateur qui
frappa l’Arménie, la France aux côtés de Charles Aznavour s’est mobilisée pour
venir en aide aux populations des zones sinistrées. Tous ces épisodes ont marqué
l’histoire des relations entre nos deux peuples et nous croyons qu’une nouvelle
page de l’amitié franco-arménienne est en train de s’écrire. Les collectivités
locales françaises et les Arméniens de France fournissent déjà une aide
humanitaire aux populations touchées par le conflit et une aide gouvernementale
a été annoncée dans la presse. Nous remercions toutes les personnes mobilisées
pour ce travail important.
Nous
croyons fermement aux valeurs de la démocratie et aux droits de l’homme que la
France défend et qui nous ont été enseignés à l’UFAR. Nous attendons à présent de
la communauté internationale et de la France plus particulièrement que tout soit
mis en œuvre pour empêcher que ces valeurs soient de nouveau bafouées.
Aussi,
la communauté des alumni de l’UFAR vous prie,
- d’user de l’ensemble des moyens à
la disposition de votre gouvernement pour mettre fin aux opérations militaires
et à l’ingérence agressive de la Turquie ; - de veiller à l’application des
mesures prévues par le droit international contre les États qui utilisent des groupes
terroristes et qui violent le droit humanitaire international, y compris, mais
sans s’y limiter, par l’emploi de la torture et le meurtre de prisonniers de
guerre, les décapitations de soldats tombés au combat (par analogie avec les
pratiques de Daesh), les bombardements massifs de cibles civiles, notamment
d’écoles et d’hôpitaux et l’utilisation de munitions interdites ; - de considérer le droit à
l’autodétermination du peuple du Haut-Karabakh, sur la base d’une sécession
réparatrice, comme la seule garantie possible pour assurer son droit
fondamental à la vie.
Enfin,
Monsieur le Président, nous souhaitons vous présenter nos plus sincères
condoléances à la suite des attentats qui ont frappé la France. Nos pensées
sont avec les proches des victimes et avec ce peuple de France que nous aimons.
Confiants
dans votre implication, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président,
l’expression de notre très haute considération.
membres
Son Excellence Monsieur
Emmanuel Macron
Président de la
République française
Paris – France