Le Moyen-Orient en feu

par | 4 Oct 2024 | Tribunes libres

L’escalade entre l’Iran et Israël pourrait affecter directement la région du Caucase du Sud. L’intérêt de l’Azerbaïdjan pour la mise en œuvre du «corridor de Zangezur» pourrait être renforcé si la position de l’Iran s’affaiblit en raison d’une guerre à grande échelle avec Israël et ses alliés, ce qui permettrait à l’Azerbaïdjan de lancer des opérations contre le territoire arménien.

 

Le Moyen-Orient a toujours été l’une des régions les plus chaudes du monde, mais les récentes tensions directes entre l’Iran et Israël ont rendu la région encore plus tendue. Les récents tirs de roquettes de l’Iran vers Israël ont exacerbé la situation, mettant en évidence les frictions importantes entre les deux parties. Il ne s’agit pas seulement de sauver la face pour Téhéran ou Tel-Aviv ; les deux pays continuent de se menacer mutuellement en publiant des listes de cibles potentielles à anéantir et à bombarder. De telles actions pourraient potentiellement conduire à une guerre à plus grande échelle, même si cette issue semblait encore évitable quelques jours auparavant.

Les opérations terrestres israéliennes au Liban et les tirs de roquettes de l’Iran ont rapproché la région d’une guerre totale, Israël ayant déclaré qu’il répondrait aux tirs de roquettes iraniens. En retour, l’Iran menace d’intensifier ses tirs de roquettes si nécessaire, ce qui pourrait déclencher un cycle de conflit durable. Ces attaques ferment toutes les voies de négociation entre l’Iran, Israël, le Liban et d’autres acteurs régionaux, ne laissant que très peu de possibilités de médiation à d’autres pays.

Il ne fait aucun doute que la question du Moyen-Orient revêt une importance significative à Washington, en particulier en période électorale. La situation a d’ailleurs été la première question posée aux deux candidats lors du débat vice-présidentiel qui s’est déroulé quelques heures après l’attaque à la roquette iranienne. L’administration Biden affirme que les États-Unis sont prêts à soutenir l’autodéfense d’Israël tout en évitant soigneusement de prendre des mesures qui pourraient compromettre la campagne présidentielle. En revanche, les républicains et Trump soutiennent ouvertement Israël et critiquent les démocrates pour ne pas avoir adopté une position plus dure à l’égard de l’Iran et pour ne pas avoir protégé Israël de manière adéquate. Les États-Unis semblent éviter de s’impliquer directement dans un conflit potentiel entre Israël et l’Iran. Même si Israël recevra l’aide nécessaire, il est peu probable que les États-Unis déploient des troupes contre l’Iran.

L’escalade entre l’Iran et Israël pourrait affecter directement la région du Caucase du Sud. L’intérêt de l’Azerbaïdjan pour la mise en œuvre du « corridor de Zangezur » pourrait être renforcé si la position de l’Iran s’affaiblit en raison d’une guerre à grande échelle avec Israël et ses alliés, ce qui permettrait à l’Azerbaïdjan de lancer des opérations contre le territoire arménien. Si l’Iran est préoccupé par Israël, l’Azerbaïdjan pourrait déclencher une nouvelle attaque contre l’Arménie, franchissant ainsi une ligne rouge importante que Téhéran ne tolérera pas, ce qui obligerait l’Iran à réagir fermement à toute tentative d’établir le « corridor de Zangezur ». Une telle réaction pourrait inciter la Turquie, alliée de l’Azerbaïdjan, à agir, bien qu’il ne soit pas certain que le président turc Recep Tayyip Erdogan s’engage pleinement contre l’Iran. Erdogan s’était engagé à s’opposer à Israël s’il attaquait le Liban, mais la Turquie est restée silencieuse depuis les actions d’Israël dans ce pays. Israël pourrait tirer profit de l’ouverture d’un autre front contre l’Iran afin d’exercer une pression sur ce pays à partir de multiples directions dans le cadre de sa stratégie militaire. Toutefois, le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev doit faire preuve de prudence, car le soutien de la Turquie pourrait être inattendu et tardif, comme ce fut le cas au Liban.

L’Arménie semble se trouver dans une position difficile, car le Premier ministre Nikol Pachinyan et le ministre des Affaires étrangères Ararat Mirzoyan affirment fréquemment que l’Azerbaïdjan ne veut pas s’engager dans le processus de paix et qu’il cherche à se soustraire aux engagements pris dans le cadre du traité de paix. Ils affirment que l’Azerbaïdjan poursuit au contraire une action militaire contre l’Arménie. Ces déclarations semblent viser à préparer l’opinion publique arménienne à l’éventualité d’une guerre ou de concessions unilatérales. L’Arménie devrait idéalement être prête à défendre son territoire par tous les moyens nécessaires ; cependant, les dirigeants ont toujours perdu face à l’Azerbaïdjan dans les guerres et les campagnes militaires passées, et cette tendance se poursuivra probablement depuis le conflit de 2020.

Source :
https://mirrorspectator.com/2024/10/03/the-middle-east-on-fire/

 

Traduit de l’anglais par Jean Dorian
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