Alors que les civils palestiniens meurent brûlés, Israël est désormais pris dans un étau dur et mélancolique, qu’il s’agisse de ses opérations militaires, de sa position internationale ou de sa politique intérieure en ébullition.
par Esther Solomon
Rédactrice en chef, Haaretz
Il n’y a pas de statu quo en temps de guerre, et cette loi de l’imprévisibilité et du danger mortel s’est encore intensifiée au cours du mois dernier, tant pour Israël que pour les Palestiniens.
Nous avons assisté au spectacle grotesque de familles palestiniennes brûlées vives dans des tentes à Gaza, conséquence involontaire mais fatale des frappes aériennes israéliennes. Nous avons vu les négociations en vue d’un cessez-le-feu et d’un accord sur les otages échouer, puis reprendre, alors que le Hamas a demandé un temps d’arrêt et que la délégation israélienne est handicapée par une autorisation officielle limitée, tandis que le nombre d’otages dont on sait qu’ils sont encore en vie diminue.
Nous avons vu un million de Palestiniens déjà déplacés quitter Rafah sur les instructions des FDI, mais avec des moyens de subsistance et d’hébergement à peine minimes. Nous avons vu des dizaines de milliers d’Israéliens toujours déplacés des deux côtés des frontières du pays, avec une guerre d’usure avec le Hezbollah qui fait désormais partie de la réalité.
Nous avons vu les tensions entre Israël et les États-Unis atteindre le niveau d’un embargo sur les armes. La pression internationale sur Israël s’est traduite par deux événements majeurs à La Haye : La demande du procureur général de la CPI de délivrer des mandats d’arrêt à l’encontre de Netanyahou, de Gallant et des trois principaux dirigeants du Hamas, ainsi que l’arrêt de la CIJ demandant l’arrêt de toute opération à Rafah risquant de porter atteinte à des civils. Trois États européens ont déclaré qu’ils reconnaissaient l’État de Palestine, qui n’est pas encore né.
En Israël, nous avons assisté à des protestations de plus en plus véhémentes en faveur d’un accord sur les otages et de nouvelles élections pour remplacer le gouvernement Netanyahou, qui bat de l’aile mais reste démagogique, ainsi qu’à des conflits explicites au sein du gouvernement lui-même.
Israël est aujourd’hui pris dans un étau dur et mélancolique, qu’il s’agisse de ses opérations militaires, de sa position internationale ou de sa politique intérieure en ébullition. Deux événements récents illustrent cette situation : Nikki Haley, candidate à la vice-présidence du GOP, est venue en Israël et a fièrement signé un missile de Tsahal avec les mots suivants : « Finissez-en avec eux » : Finissez-les ».
Il s’agissait d’un effort performatif pour gagner l’attention de la base du GOP et du candidat présidentiel présumé, Donald Trump, et pour établir un espace de campagne clair entre la droite américaine « pro-israélienne » et ce qu’elle tente de présenter comme un président Biden perfide. Ce fut un autre rappel de l’instrumentalisation croissante de la guerre de Gaza aux fins de novembre 2024.
L’Arabie saoudite, grand espoir de l’administration Biden pour mettre fin à la guerre de Gaza et inaugurer une nouvelle architecture de sécurité au Moyen-Orient, y compris une normalisation avec Israël, a condamné sévèrement les actions d’Israël à Rafah, l’accusant de commettre des « massacres génocidaires continus ».
Apparemment sur tous les fronts, Israël est confronté à une détérioration croissante de sa position. Existe-t-il un moyen de s’en sortir ? Et est-il possible de revenir sur les dommages subis ?