Des armes israéliennes pour les criminels de guerre

par | 7 Sep 2023 | Éditorial

Des armes israéliennes pour les criminels de guerre

 

Éditorial de Haaretz

 

Israël a continué à vendre des systèmes d’armes avancés au Myanmar, même après le coup d’État militaire de 2021. Israel Aerospace Industries et Elbit Systems ont envoyé des équipements à l’armée du Myanmar ces dernières années malgré un embargo international sur les armes et malgré une déclaration du gouvernement en 2018 indiquant qu’il avait mis fin aux exportations d’armes vers le Myanmar (Oded Yaron, Haaretz, 5 septembre).

Après la victoire aux élections de 2020 de la dirigeante politique et lauréate du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, la junte militaire a repris le pouvoir, arrêté les dirigeants élus et lancé une campagne meurtrière pour réprimer l’opposition. L’armée de l’air bombarde un concert, des rassemblements de civils, des écoles, des hôpitaux et des lieux de culte. Selon les chiffres des Nations unies, les militaires ont tué plus de 3 500 civils depuis le coup d’État.

Israël entretient des relations approfondies avec le Myanmar en matière de sécurité, depuis l’époque où ce pays s’appelait la Birmanie. Il a refusé de cesser de lui vendre des armes pendant le règne ouvert de la junte et, plus tard, pendant le génocide des Rohingyas en 2016-2017. Les défenseurs des droits de l’homme ont saisi la Haute Cour de justice d’Israël de cette question, mais la décision rendue par la Cour en 2107 a été gardée secrète, à la demande de l’État. Ce n’est qu’en 2018 qu’Israël a annoncé publiquement qu’il mettait fin aux exportations d’armes vers le Myanmar. Les ventes se sont toutefois poursuivies. Des documents attestent de livraisons de patrouilleurs militaires, de systèmes radar, de systèmes aéroportés, de drones, d’équipements de fabrication d’armes et de systèmes de surveillance électronique avancés, et des responsables de l’armée du Myanmar ont été enregistrés en train de visiter une exposition d’armes en Israël.

Le ministère de la défense autorise également la vente d’armes de pointe à des États non démocratiques, qui les utilisent contre leurs citoyens : militants des droits de l’homme, journalistes, minorités et personnes LGBTQ. Haaretz a révélé des ventes de logiciels espions et de technologies de surveillance électronique invasives à des pays tels que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Maroc, l’Éthiopie, l’Ouganda, l’Azerbaïdjan, le Pakistan, le Bangladesh, l’Indonésie, le Viêt Nam et Singapour. Dans le même temps, des marchands d’armes numériques israéliens opèrent depuis l’étranger, apparemment sans la supervision du ministère de la défense, et vendent des outils d’espionnage au plus offrant, y compris à des milices meurtrières au Soudan.

Un représentant de l'armée du Myanmar à l'exposition sur la défense et la sécurité intérieure d'Israël à Tel Aviv, le 4 juin 2019.

Les exportations d’armes israéliennes ont battu des records cette année en raison de la guerre en Ukraine et des accords d’Abraham. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre des finances Bezalel Smotrich se sont vantés que « les industries de défense débordent de commandes », et Israel Aerospace Industries a organisé une fête extravagante de trois jours. Ce « succès » est une tache sur l’image d’Israël. Pour son plus grand déshonneur, Israël a l’habitude d’être du mauvais côté de l’histoire. Israël et les fabricants d’armes doivent cesser d’armer les dictatures et les dirigeants qui utilisent la technologie israélienne contre des civils innocents. Le ministère de la défense, le gouvernement et le pouvoir judiciaire doivent cesser de prêter la main à ces pratiques.

Traduit de l’anglais par Jean Dorian
Source :
L’article ci-dessus est l’éditorial principal de Haaretz, tel qu’il a été publié dans les journaux hébreux et anglais en Israël.

Des armes israëliennes pour les dictatures