Lettre d’appel de l’UGAB au Département d’Etat américain concernant le génocide imminent des Arméniens du Haut-Karabakh par l’Azerbaïdjan.
The Honorable Antony J. Blinken
Secretary
U.S. Department of State
2201 C Street NW
Washington, DC 20520
Le 10 août 2023
Monsieur le Secrétaire Blinken :
Le temps des déclarations diplomatiques, des dénonciations publiques, des résolutions nobles, des négociations et des points de discussion est écoulé. Un génocide arménien du 21e siècle est imminent et l’inaction continue du monde libre permettra à l’auteur de ce génocide, l’Azerbaïdjan, de mener à bien sa mission.
En tant que président de l’Union générale arménienne de bienfaisance (UGAB), la plus grande organisation arménienne à but non lucratif au monde, je me dois de tirer la sonnette d’alarme au nom des millions d’Arméniens-Américains vivant aux États-Unis et qui s’inquiètent pour leurs frères et sœurs dans la patrie de nos ancêtres.
L’Azerbaïdjan ne comprend manifestement pas les mots sans les actes. Il ne comprend pas le langage de la raison, de la paix et de l’humanité. Cela a été démontré de manière frappante par son blocus prolongé de la seule route qui relie les Arméniens du Haut-Karabakh au monde extérieur, interrompant l’acheminement de nourriture, de carburant, de médicaments et d’autres produits de première nécessité.
Cette semaine, Luis Moreno Ocampo, l’un des plus grands protecteurs des droits de l’homme au monde, a dit les choses telles qu’elles sont : les actes abominables commis par l’Azerbaïdjan à l’encontre d’Arméniens innocents correspondent à la définition même du génocide.
L’estimé Ocampo, qui a consolidé sa réputation lorsqu’il a contribué à libérer son Argentine natale de la dictature militaire, a ensuite été le premier procureur de la Cour pénale internationale et a traduit en justice certains des pires despotes, a publié un nouveau rapport explosif dans lequel il fait une prédiction très désastreuse : Si nous n’agissons pas, et vite, nous risquons d’assister très bientôt à un nouveau génocide arménien.
Le rapport d’Ocampo affirme que les actions de l’Azerbaïdjan contre les Arméniens ont beaucoup en commun avec certains des massacres les plus monstrueux de l’histoire, de l’extermination des Arméniens eux-mêmes en 1915 à la famine systémique des Juifs par les nazis en 1939, en passant par des tactiques similaires appliquées à Srebrenica en 1993 et 1994.
Ce n’est pas une nouvelle pour l’UGAB.
Au cours de ses 117 années d’existence, l’UGAB a eu pour mission de sauver et d’améliorer la vie des Arméniens dans le monde entier. L’UGAB a été l’un des premiers témoins du génocide de 1915. Plus d’un million et demi d’Arméniens sujets de la Turquie ottomane ont péri lors de massacres systématiques et de tueries barbares, de famine et de marches forcées vers la mort dans le désert syrien. À l’époque, nos appels à la communauté internationale sont restés vains, malgré les nombreux témoignages de diplomates internationaux et les nombreux reportages et photographies documentaires graphiques réalisés par des journalistes étrangers en poste en Turquie. Le monde a regardé cette époque avec horreur, mais n’a pas agi de manière décisive et collective pour empêcher les dirigeants ottomans de mettre en œuvre leurs objectifs génocidaires.
L’expression « les Arméniens affamés » s’est répandue et, ironiquement, le blocus azéri du Haut-Karabakh, qui en est à son huitième mois, affame littéralement les 120 000 civils arméniens du Haut-Karabakh. Aujourd’hui, ces familles arméniennes innocentes sont isolées dans un piège mortel, de sorte que même les groupes d’aide humanitaire, y compris l’UGAB, ne peuvent pas intervenir pour soulager la famine généralisée qui s’est abattue comme un fléau sur plusieurs générations.
L’Azerbaïdjan a apparemment mal interprété la réponse tiède de la communauté internationale à ses violations flagrantes du droit international comme une autorisation tacite d’utiliser tous les moyens nécessaires pour éliminer une communauté chrétienne qui a des racines anciennes dans le pays et la région. Nous devons prouver à l’Azerbaïdjan qu’il a tort, et pas trop tôt.
Alors que les conflits mondiaux qui se disputent les ressources et l’attention ne manquent pas, le rapport d’Ocampo sur la situation au Nagorny-Karabakh est un appel urgent à la vigilance de la part d’une voix morale majeure qui mérite votre attention et votre action. C’est pourquoi j’ai pris la liberté de partager l’intégralité du rapport.
Nous espérons que ces conclusions alarmantes vous obligeront à apporter une aide immédiate, directement par l’intermédiaire des Nations unies ou par voie aérienne, en envoyant un message clair au régime d’Aliyev pour qu’il ouvre immédiatement le corridor de Lachin, « garantissant la circulation sans entrave des personnes, des véhicules et des marchandises dans les deux sens ».
L’Azerbaïdjan doit également être informé qu’en cas de non-respect de cette obligation, il sera tenu pour responsable par la communauté internationale et subira des conséquences juridiques.
Le moment est venu d’empêcher un nouveau crime contre l’humanité avant qu’il ne soit trop tard.
Nous vous remercions par avance de l’attention que vous porterez à cet appel extrêmement urgent.
Cordialement,
Berge Sétrakian
Président de l’UGAB