L’université française en Arménie fête ses vingt ans :
message d’un ancien ambassadeur aux étudiants
L’Université française en Arménie a aujourd’hui l’âge de ses étudiants : celui où l’avenir se décide et se construit, celui où la réussite engage la vie future et, à travers le parcours de chacun, les espoirs familiaux et le destin même d’un pays.
Vingt ans. Un peu moins, même, dans sa forme, son fonctionnement et sa dénomination actuelle — l’UFAR — dont les statuts ont été préparés et déposés par l’ambassade de France le 13 novembre 2003, soit presque deux ans après mon arrivée en Arménie, permettant ainsi au premier Recteur, Paul Rousset, auquel je tiens ici à rendre hommage, de mettre sur pied les cursus L.M.D. (Licence, Master, Doctorat) permettant d’accéder aux diplômes d’État français, corroborés par les diplômes arméniens correspondants.
Même s’il a fallu, pour en arriver là, vaincre bien des réticences de part et d’autre, ce projet reposait dans mon esprit sur trois idées simples :
- offrir dans leur pays aux jeunes Arméniens un avenir à la hauteur de leurs talents ;
- faire de cette université un laboratoire d’idées et de projets pour l’Arménie afin qu’elle y puise, au prix d’une déontologie et d’une équité sans faille, les ressources intellectuelles nécessaires à la démocratisation de la société, au progrès économique et au progrès politique ;
- faire de la francophonie le synonyme d’appartenance à l’élite arménienne.
Dix-huit ans plus tard, 90 % de nos diplômés ont des postes de responsabilité en Arménie ; avec 75 % d’étudiantes, l’UFAR est un facteur essentiel de la promotion des femmes en Arménie et nous savons tous (surtout nous, les hommes) que ce sont les femmes qui font avancer les sociétés ; à mon départ, fin 2006, l’UFAR décrochait déjà la première place dans le prestigieux concours européen des juristes René Cassin, devant les plus vieilles et réputées universités d’Europe, inaugurant ainsi une longue liste de succès engrangés par les promotions et les recteurs successifs, tous profondément impliqués dans la réussite de leurs étudiants et l’excellence des enseignements dispensés ; en octobre dernier enfin, se tenait en Arménie le XVIIe sommet international de la francophonie, étroitement associé dans l’esprit de Monsieur le Président de la République Emmanuel Macron à la présence de l’UFAR, ainsi que cela ressort d’une lettre qu’il m’a adressée à son retour.
Durant ma mission, on m’a souvent objecté que ce projet était surdimensionné pour un pays modeste quant à sa population et son étendue. Je répondais toujours que c’était l’intelligence des jeunes Arméniens qui était surdimensionnée. Je ne me suis pas trompé, puisque l’ambition de M. le Recteur Lavest, partagée par nos plus hautes autorités, est de doubler les effectifs, ce qui suppose de nouveaux bâtiments, de nouvelles filières intégrant les mathématiques et le numérique.
Ainsi l’UFAR pourra accompagner les évolutions en cours en Arménie qui tendent à mettre à l’honneur l’éthique qu’elle inculque, le sens des valeurs et le respect de soi et des autres, qui font depuis les origines sa force et sa réputation. Je ne doute pas que les Arméniens de la diaspora, qui aiment si fort l’Arménie et tout autant la France, souhaitent y contribuer.
Très chers étudiants et étudiantes de l’ufar
Avec vos prédécesseurs, ceux des toutes premières promotions en compagnie desquels j’ai parcouru vos montagnes et vallées, m’imprégnant de vos paysages, je me suis risqué à dire qu’ils avaient un pays à construire, qu’ils avaient à façonner cette terre dont ils étaient faits, selon l’image qui serait la leur du bonheur.
Ce bonheur-là est celui que je vous souhaite aujourd’hui encore de tout mon cœur.
Bien amicalement à tous et à toutes.
Henry Cuny
Ancien ambassadeur de France en Arménie
(janvier 2002 — octobre2006)